Envers et contre tout, le marché de l’immobilier a fait de la résistance malgré deux confinements en 2020. Résultat, les prix ont continué de progresser. Mais cette hausse va-t-elle continuer en 2021 ? Rien n’est moins sûr.

« On devrait connaître une crise comparable à celle de 2012-2013 avec une correction des prix de 10% à 15%. » Voici ce qu’avançait fin mars, au début du premier confinement, Jean-François Humbert. Celui qui était alors président du Conseil supérieur du notariat pensait que la crise du coronavirus allait faire chuter le nombre de transactions immobilières et donc les prix, par ricochet. Il faut dire, qu’à l’époque, les visites de logements étaient interdites tout comme les déménagements. Sauf que ce scénario ne s’est pas du tout produit.

« Un phénomène de rattrapage » après « le premier déconfinement »

« Un phénomène de rattrapage a été observé durant les mois qui ont suivi le premier déconfinement, quand les projets mis en suspens en mars se sont additionnés à ceux qui ont émergé pendant ces huit semaines. Juin et juillet ont été des mois records en termes d’activité », explique le réseau Century 21. Et le second confinement n’a pas enrayé cette dynamique.

Le marché immobilier miraculé

Au final, la demande est demeurée extrêmement soutenue, portée par des taux immobiliers proches de leurs plus bas historiques. Le volume de vente est resté proche du million, à 980 000 opérations, soit une simple baisse de 8% par rapport au record de 2019. « Comparé à d’autres secteurs économiques, le marché immobilier de l’ancien fait figure de miraculé, lâche Laurent Vimont, le président de Century 21. Ceux qui affirmaient que la Covid entraînerait un effondrement des prix se sont lourdement fourvoyés. L’immobilier résiste, envers et contre tout. Les Français s’ajustent, s’adaptent et rebondissent, profitant des taux bas pour concrétiser leur rêve : la pierre, symbole de stabilité quand la Bourse s’agite, de sécurité pour la famille quand les repères s’étiolent, de valeur refuge quand l’avenir s’obscurcit ».

« Ceux qui annonçaient un effondrement des prix se sont lourdement fourvoyés »

Analyse similaire de Jean-Marc Torrollion, le président de la Fédération de l’immobilier, la Fnaim. Pour preuve, les prix se sont non seulement maintenus, mais ont enregistré une progression de 4% en 2020. Au niveau national, le prix moyen du mètre carré s’établit fin 2020 à 2 807 euros. Dans le détail, les prix des appartements ont connu une hausse de 5,3% à 3 844 euros et de +2,4% pour les maisons à 2 276 euros. Des moyennes qui cachent de fortes disparités selon les territoires. A Paris, les prix ont encore progressé de 3,4%, selon la Fnaim, pour atteindre les 10 534 euros du mètre carré. Sur l’ensemble de l’Île-de-France, la hausse a été plus franche (+5,4%). En régions, si les prix ont augmenté de 3,3%, les métropoles se détachent. Rennes, Nîmes, Nantes et Montpellier ont vu leurs prix flamber, respectivement de 7,4%, 6,2%, 5% et 4,5%.

Le spectre des faillites et du chômage

Cette dynamique va-t-elle tenir cette année alors que la situation économique reste difficile ? Eric Heyer, économiste à l’OFCE, craint ainsi que les faillites d’entreprises liées à la crise du coronavirus entraînent « environ 175 000 » destructions d’emploi avec une hausse du taux de chômage qui atteindrait 10,6% de la population active fin 2021. Dans ce contexte, le vent risque de tourner pour le marché immobilier.

« Un effet progressivement sédatif sur les prix dans l’ancien »

Mais, cette fois, les experts du secteur prennent des pincettes. Pas de prévision chez Century 21 ou Orpi ni du côté de la Fnaim. « La montée du chômage devrait peser sur la demande et rééquilibrer la relation acquéreur – vendeur. L’attentisme qui en résulterait ferait tomber le nombre de transactions annuelles sous la barre des 900 000 unités avec un effet progressivement sédatif sur les prix dans l’ancien », avance Alain Tourdjman, directeur des études et prospectives du groupe BPCE. Mais l’impact sur les prix serait au final très faible : une baisse de 1 à 2% au maximum en moyenne en 2021 et 2022.

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Un repli limité des prix, sauf si…

Une analyse partagée par Thomas Lefebvre directeur scientifique de Meilleurs Agents qui table aussi sur un repli de 1% cette année. Pour ces deux experts, c’est le niveau exceptionnellement bas des taux d’intérêt – moins de 1% sur 20 ans pour les meilleurs profils, hors assurance emprunteur – qui va permettre d’empêcher un krach immobilier. Selon les courtiers interrogés par MoneyVox, ils devraient rester au plancher au moins jusqu’à la fin du premier semestre grâce à la politique accommodante de la Banque centrale européenne.

Par ailleurs, obtenir un crédit immobilier sera plus facile que l’année passée. En effet, le Haut Conseil de Stabilité Financière, présidé par le ministre de l’Économie, vient d’assouplir les règles liées au taux d’endettement maximum, désormais plafonné à 35%. Depuis la fin 2019, une banque ne pouvait pas, sauf exception, permettre à ses clients de s’endetter au-delà de 33% de leurs revenus, écartant du crédit de nombreux particuliers qui dépassaient légèrement cette limite. « 2021 pourrait continuer à offrir des conditions exceptionnelles d’achat », s’exclame Thomas Lefebre. Bémol cependant : « cette prévision est à prendre avec prudence tant l’évolution du marché et de ses fondamentaux dépendra de celle de l’épidémie de coronavirus. »